Musique et tergiversation sur tout et rien, surtout rien.

dimanche 26 février 2012

Lifelover - Konkurs

Après deux excellents albums aussi maladifs que jouissifs, Lifelover revient hanter nos esprits par le biais de ce Konkurs, sortie pour l’occasion chez Avantgarde Music. La Suède doit être un de ces rares pays à produire autant de pathologie mentale, quand on voit la quantité de groupes dérangés qui en émerge, et l’on pense ici à Shining, Woods of Infinity ou encore Hypothermia.

Le point commun entre ces groupes, d’un point de vue musicale, pourrait être cette attirance pour le rock, au sens large, mélangeant ainsi leur black metal avec un soupçon de mélodies rockisantes, si repoussantes pour certain, mais pourtant si génialement inspirées qu’elles imposent le respect. Car au fond, ce qui attire ces groupes vers un tel mélange n’est pas tant l’aspect mélodique, ou un quelconque éventuel succès qui pourrait surgir de l’utilisation de quelques riffs rock intelligemment disséminés. Non, ce qui motive ces groupes, et en l’occurrence Lifelover, à utiliser du matériel rock dans ses compos, c’est bien le pathologique, le maladif, ce qui écorche et qui ronge, le côté malsain du rock. Et c’est là tout le génie de Lifelover, utiliser à merveille tant les aspects malsains du black que ceux du rock, le tout pour un rendu quasi géniale. Les mélodies sont simples mais sincères, elles viennent des tripes, du cœur, elles s’expriment sans équivoque, elles sont là un point c’est tout, aussi franche qu’un gros riff metal destructeur, aussi puissante en cela qu’elles s’expriment sans fausseté.

Lifelover apparaît sur la scène en 2005, produit deux albums, aussi génial l’un que l’autre comme je l’ai déjà dit (oui, j’aime me répéter). Pourtant, ils nous reviennent en cette fin d’année 2008 plus dérangés que jamais, bardés de mélodies hyper accrocheuses qui ravagent les neurones comme ces substances étranges que nous consommons pour s’absenter de nous même. Le pari n’était pas gagné, je me demandais sérieusement comment il allait être possible de poursuivre dans la même voix sans pondre un album « bis » ne faisant que reprendre une recette déjà présentée. Et pourtant, les écoutes se poursuivent, et la maladie se développe. Ce Konkurs se révèle bien être un joyau de noirceur, un petit bijou de malsain, un concentré de mal-être. Chaque mélodie est à sa place, on oscille entre douce mélopée quasi pop et arpèges décharnés typiquement black metal. L’utilisation d’un clavier toujours bien placé renforce les accords déments et les mélodies infernales qui émergent de cette galette. Et puis il y a cette voix, maladive, en proie à de terribles tourments sans aucun doute, complètement arrachée et angoissante, pire qu’à fleur de peau, c’est un arrachement de peau proprement dit, un arrachement des veines même, un arrachement de ce putain de poison qui coule dans nos veines. Ces types carburent au mal-être pour nous sortir des albums toujours plus travaillé et toujours plus noir. Car oui, j’ai la sensation que cet album est plus travaillé, on sent que chaque morceau a été bossé à fond, histoire d’être sûr qu’il n’y ait pas une seule fausse note, pas un seul truc qui nous sorte de l’ambiance. Pari réussi, on ne décroche pas une seule seconde, et on se remet difficilement de la fin de l’album…

Nuit noire accompagnée d’un faible halo immanent de quelques immuables lampadaires. Froid hivernal, neiges fondues recouvrant les constructions humaines. Alcool dans le sang, permettant de s’absenter à soi-même. Voilà les conditions qui permettent d’apprécier pleinement cet album, voilà à quoi cet album me renvoie personnellement. Une froideur quasi physique, un détachement de toute chose y compris de soi, et une souffrance si profonde qu’elle semble indétachable de notre être. Voilà comment la musique de Lifelover prend toute son ampleur, musique du non sens que nous ressentons chaque jour, non sens incontrôlable qui ravage la réflexion, qui détruit l’esprit, mais qui pourtant sonne présent à chaque réveil. Lifelover exprime à merveille ce non sens, et ce depuis le début de sa carrière.

La vie est une substance amère que l’on boit chaque matin sans vraiment savoir pourquoi, un poison qui nous ronge sans cesse de l’intérieur. Et quand nos âmes errent sans but dans notre cervelle à demi consciente, Lifelover est là pour exprimer nos tourments, entre crise d’angoisse et désespoir, Lifelover est le son qui enveloppe notre chaire de coton pour ne plus rien sentir, c’est la bouteille que notre main fébrile serre comme croyant trouver dans cette étreinte une solution pour un lendemain plus posée. A travers ce « Konkurs », Lifelover signe son avènement, ils s’étaient déjà présentés comme des torturés de la cervelle, ils s’affirment désormais comme des bourreaux de la psyché.

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