Musique et tergiversation sur tout et rien, surtout rien.

mardi 28 février 2012

Hjarnidaudi - PsykoStareVoid



Un an après la réédition du premier album, l’étrange entité qu’incarne Hjarnidaudi nous revient, en ce début d'automne, plus atroce que jamais, toujours paré à nous asséner des pires tourments. Signé sur le label français MusicFearSatan pour cet album, je dois dire que je l’attendais avec une certaine impatience.

La première chose qui frappe est l’absence de vocaux, puisque ce qui a amené à la postérité musicale le combo est du à la pose de vocaux par le vocaliste de Shining, sur le premier album, qui s’est ainsi vu infligé, en plus d’une réédition, une promotion digne de ce nom. Mais bien évidemment, le deuxième opus poursuit sa route sans l’appui commercial que représente forcément la présence du Sieur Kvarforth (non point que cela lui soit reprochable néanmoins). On se trouve ainsi en présence d’un objet massif, pachyderme de près de trois quart d’heures, imposant ses sonorités distordues et son ambiance mortifère sans la moindre once d’humanité.

Notons de suite que l’album a été composé en même temps, dans le mois suivant pour ainsi dire, que le premier album « Pain.Noise.March ». On en reconnaît d'ailleurs les sonorités, la construction même de certaine partie, notamment cette monté en puissance si caractéristique qui explose dans un maelstrom de distorsion complètement subversive (morceau IV). Autant le dire tout de suite, la continuité entre les deux albums est quasi évidente, si ce n’est l’absence de vocaux. On pourrait même penser à un B-side, tellement les morceaux auraient pu être présents sur le premier opus. On reconnaît aisément les sons aigus et défigurés proposant leurs mélodies infâmes, ces riffs de fond qui construisent un mur aussi noir que la nuit, et ces tempos hors du temps, imposant une rythmique infernale, martiale, hypnotique.

Faut-il pour autant n’y voir qu’un succédané du premier album ? Loin s’en faut ! Car chaque morceau de Hjarnidaudi est une nouvelle pièce de l’horreur Suprême, nouvelle pièce d’une construction horrifique kaléidoscopique, nouvelle avancée dans une brume toujours plus épaisse, toujours plus sombre, toujours plus insondable, mais pourtant toujours aussi dérangeante.
La musique de Hjarnidaudi est étrange. Plus encore, elle personnifie l’Etrange. Quand tous les liens se disloquent, quand le sens s'effondre et fond, alors la musique prend toute son envergure. L'a-musicalité au service de l'hallucination, des non-mélodies chaotiques dégoulinent dans vos oreilles, laissant une trace suinteuse dans vos pensées, rongeant tout espoir et brûlant toute volonté. Une musique horrifique, presque Lovecraftienne tant elle évoque les horreurs sans noms, l'Indicible, les chutes sans fins, les espaces temps si différent qu'ils semblent inimaginables, à la fois énormissimes et réduit à l'impalpable.

PsychoStareVoid approfondi encore d’avantage le fond des horreurs, l’album nous fait atteindre une dépression latente quasi évidente. Kvarforth l’avait certainement bien compris lorsqu’il a décidé de poser ses vocaux sur le premier album, tant ces derniers touchent à l’angoisse agonique dans sons vécu le plus paroxystique. Ici on touche à un degré plus poussé de l’Absurde, plus ignoble encore que la perte de sens, puisqu’imposant l’infamie du Non-sens comme réalité suprême. On touche ici au pivot des deux albums : si le premier nous fait renoncer au monde tel qu’il nous est présenté, le second impose la réalité de l’Absurde, de l’impitoyable et indubitable Chaos comme réalité, externe autant qu’interne. L’ordre des morceaux y contribue d’ailleurs avantageusement, le premier s’affirmant comme explosion des sens, le final s’énonçant comme un noyage des plus totales de toutes perceptions et toutes conceptions.

Hjarnidaudi signe ainsi sa second œuvre, si l’on omet de compter ses premières expériences sous le nom de Hlidolf. Le géniteur de ces œuvres aussi dantesques que déstructurées, Vidar Ermesjø, plus que d’être habité par un ou quelques démons, ré-invente le non-être, le vide, celui qui ronge notre cervelle à note insu. Hjarnidaudi est une expérience de perte de contact avec la réalité et avec soi-même, une absence dans son sens le plus pure, un trou noir absorbant dont on ne peut se défaire, une expérience unique de dépersonnalisation.

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