Redefining Darkness est donc le 8ème album de Shining.
« Le plus sombre » comme d’habitude évidemment, accompagné avec toute
la pseudo promo sur l’absence de la numérotation romaine et le design de la
pochette. Qu’en dire ? Rien, car il n’y a fondamentalement rien d’intéressant
là-dedans. La pochette est globalement laide et n’apporte pas grand chose au
propos du groupe (l’ombre dans la lumière et tout ça… sérieusement ?).
Quant à l’arrêt de la numérotation, celui-ci ne fait même pas sens puisque le
groupe poursuit dans le style lancé avec leur sixième album, sans évolution
majeure, sans rupture avec ce qui a précédé.
Mais reprenons un peu en avant si vous le voulez bien. Klagopsalmer
m’avait plu, malgré la déception comparé à Halmstad. Je m’étais dis que le
groupe expérimentait sans doute de nouvelles pistes, ce qui nécessite forcément
un temps d’adaptation, de recherche. Les compos m’apparaissaient non abouties,
mais pas inintéressantes pour autant. Seul défaut de l’album : il est vite
devenu insipide et ennuyant. La sortie du septième album m’avait rendu
violemment sceptique également : je le trouvais mal mené, avec des idées
brouillons non abouties, des ambiances tronquées pour être remplacées par de la
bouillie de metal.
Et bien c’est la même chose ici. Rien n’est abouti, tout est réutilisé.
Et vas-y que je te place un riff qui ressemble à un autre déjà joué sur un
autre album mais un peu différent, et vas-y que je te réutilise des idées pas
fraîches (et bim un zolie arpège, et bam un interlude au piano en guise de
cinquième piste). Ouais mais ça ne fait pas tout. Alors hop, on mélange à ce
qui sonne à mes oreilles comme une vilaine bouillabaisse metal, toujours aussi
indigeste, sans personnalité, sans intensité émotionnelle et surtout sans
intérêt. Bref, Shining secoue toujours les mêmes éléments et obtient donc
globalement la même sauce que sur ses deux derniers albums. Je n’ai rien contre
les groupes qui suivent une ligne plutôt intégriste quand à leur manière de
composer et jouer de la musique, ni contre les groupes qui expérimentent et
tentent d’évoluer. La question qui me reste pour juger d’un parti pris
artistique sera toujours l’ambiance globale et sa cohérence générale :
ici, rien ne semble tenir la route, l’écoute n’est pas fluide et au final on se
lasse.
Reconnaissons tout de même que Kvarforth et son équipe ont encore quelques
bonnes idées, dissimulées ici ou là. Le retour de quelques riffs plus black par
exemple (sur le premier morceau surtout) ; un son de basse toujours aussi
imposant et rond ; des arpèges qui malgré leur prévisibilité apparaissent
tout de même remarquablement travaillés, donnant une vraie profondeur à la
guitare sèche (un peu comme sur Halmstad… mais juste un peu). Et puis il y a
aussi ce second morceau, qui me fait dire « mais quel gâchis ». C’est
à mon sens la seule compo réussie sur cette galette, ce qu’on doit en partie à
l’utilisation d’un saxophone qui porte une grosse partie de l’ambiance globale du
titre et apporte aussi un nouveau visage au groupe, ébauché depuis un certain
temps déjà, autour d’un aspect plus nostalgique que désespéré. Quand j’entends
ce morceau, je ne peux m’empêcher de penser que le reste est raté. Pire encore,
j’ai la désagréable sensation que le groupe aurait sincèrement pu faire quelque
chose de bon, voire d’excellent, quand je regarde leurs trois derniers
albums : ça fourmille de bonnes idées, qui ne demanderaient qu’à être
approfondies, mises en avant, construites, accompagnées à bonne escient. Mais
ça, c’est le boulot d’un vrai groupe.
Je n’attendais rien de spécial de cet album, mais pas à ce point… Que
Shining cherche à innover, pourquoi pas. Qu’il songe à utiliser des structures
pop mélangées à du metal conventionnel, je n’ai rien contre. Qu’ils essayent
d’approfondir ce qui avait rendu Halmstad exceptionnel, c'est-à-dire toutes ces
parties blues, je suis absolument pour. Mais pour l’amour de la musique, qu’ils
réécoutent ce qu’ils font et qu’ils prennent le temps de composer un vrai
album, de bout en bout, plutôt que d’agir à la va-vite et de tout gâcher. Il est rare que je descende une sortie, et
c’est davantage d’un coup de gueule dont il s’agit ici : le groupe vaut
mieux que ça et il le sait.